Dossier dopage

L'UCI communique sur le passeport biologique


14/06/2012 - cyclisme-dopage.com - Marc Kluszczynski

Remarque : on parlera dans cet article de Passeport Biologique®(Sportif) qui est une marque déposée et dont l'Institut de Biotechnologie de Troyes du Pr Dine en possède l'antériorité scientifique, ou de passeport sanguin. On peut actuellement considérer que les deux termes sont équivalents, le passeport stéroïdien n'étant pas encore opérationnel.

L'UCI a tenu une conférence de presse sur le Passeport Biologique le vendredi 8 juin à Paris et a précisé qu'aucune autre rencontre ni échange avec la presse au sujet des stratégies antidopage de l'UCI ne serait organisée avant le départ du Tour de France.

Suite aux recommandations de l'AMA, les experts du passeport sanguin ont donc quitté le giron de l'UCI et travaillent désormais pour une structure indépendante, l'APMU ou Athlete Passport Management Unit qui dépend du laboratoire antidopage de Lausanne. L'APMU agit en prestataire de service pour certaines fédérations internationales et agences nationales antidopage, leur facturant ses services. Le Dr Neal Robinson en est le responsable. Il n'y a donc plus de lien direct entre les experts du passeport et l'UCI ; celle-ci, accusée dans le passé de conflits d'intérêts, insiste sur l'indépendance des experts.

Comme le souligne le Président Pat Mc Quaid, le Passeport Biologique constitue sans doute l'outil le plus performant parmi ceux dont l'UCI dispose dans son engagement contre le dopage. Il a transformé les comportements au sein du peloton. Le passeport n'est pas encore l'arme absolue, mais son effet dissuasif a permis une modification des paramètres hématologiques : les taux d'hémoglobine sont plus bas et les taux de réticulocytes, témoins d'une transfusion sanguine ou d'une utilisation d'EPO, très abaissés.

Les tricheurs se sont-il adaptés au radar du passeport et les profils sanguins sont-il davantage normaux, grâce aux microdoses d'EPO ? L'UCI le reconnaît et est consciente du problème. Elle assure travailler à la détection de ces microdoses. Le Dr Neal Robinson révèle que l'Hématide (mimétique de l'EPO) est détectable ainsi que l'AICAR. Aucun athlète n'a cependant encore été contrôlé positif à ces produits.

Au-delà de la satisfaction de l'UCI, on se demande tout de même si le passeport sanguin n'a pas déjà atteint ses limites.

Pat Mc Quaid pense que le passeport a changé la culture dans le cyclisme. Pour l'instant, les produits dopants sont utilisés à moindre dose et de manière moins prolongée. L'impact sur la performance et sur la santé du cycliste est minoré. Reste à imposer la politique de non injection (no needle policy) déjà en application chez Garmin et les équipes françaises du MPCC (en tout cas officiellement) avant que l'UCI ne s'y rallie. Difficile de savoir dans quelle mesure les autres équipes l'appliquent.

Si l'on ajoute que les Grands Tours, qui tiennent à leur réputation et à leurs sponsors,et font le ménage avant le départ, on ne peut nier un recul du dopage. Cela permet de créer une nouvelle hiérarchie dans le cyclisme. Le recul du dopage n'est pas préjudiciable au spectacle : il n'y a plus de leader caracolant en tête avec plusieurs minutes d'avance et les capitaines d'équipe sont davantage isolés, même si au lendemain de cette conférence de presse Bradley Wiggins et ses coéquipiers de chez Sky faisaient un tir groupé dans la montée de Joux Plane, lors du Dauphiné Libéré. Tony Martin (OPQS) et plusieurs observateurs ont d'ailleurs comparé la démonstration de force des Sky à l'US Postal de Lance Armstrong. Dans cette étape de Morzine, Wiggins était escorté par trois lieutenants qui, d'après Martin, pourraient être leaders dans d'autres équipes. Comme au temps de l'US Postal pourrait-on lui rétorquer. Mc Quaid explique la réussite collective des Sky (dont le fils Mc Quaid gère les intérêts de certains coureurs) par une nouvelle façon d'entraîner et de gérer le calendrier des coureurs.


Marc Kluszczynski est pharmacien
Il est titulaire du diplôme universitaire de dopage de l'université de Montpellier (2006)
Il est responsable de la rubrique "Front du dopage" du magazine Sport & Vie et collabore à cyclisme-dopage.com


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Cette page a été mise en ligne le 14/06/2012