Dossier dopage

Les carences des contrôles


cyclisme-dopage.com

De contrôles "inopinés" annoncés à l'avance, en contrôles non effectués ou en résultats escamotés, les exemples de complicités entre instances dirigeantes et coureurs sont nombreux.

En voici un florilège.

Affaires étouffées

Gerben Karstens (Tour de France 1974)

« Le 2 juillet 1974, Gerben Karstens, arrivé deuxième de l'étape Caen-Dieppe, se soustrait au contrôle antidopage à l'arrivée. Le commissaire de l'UCI, l'Italien Dominicio Menilio, dresse un constat de carence en présence de Mondenard. Bon prince, Lévitan lève unilatéralement la sanction, bafouant l'autorité de l'UCI, seule compétente sur les contrôles. D'abord réticent Dominicio Menilio s'exécute. "Il a eu un contact avec l'UCI qui lui a ordonné de refaire le contrôle", assure "JPDM".».

Source : La face cachée de l'Equipe, David Garcia, page 442

Loi du silence sur les premières infractions

Dans les années quatre-vingt, il était d'usage de ne pas révéler les contrôles positifs quand le coureur n'était pas en situation de récidive. Lire à ce sujet l'article de Noël Couëdel le 11/09/1981.

Source : L'Equipe 11/09/1981

Jean-Christophe Currit (Paris-Bruxelles 1994)

Le 28 mai 2001, devant le Tribunal de Poitiers, dans le cadre de l'affaire du Pot Belge, Jean-Christophe Currit déclare : «La FFC ne parlait pas de dopage. Je peux révéler aujourd'hui que j'ai été positif sur Paris-Bruxelles en 1994 aux amphét', une épreuve de Coupe du monde de fin de saison. La Fédé a dit à mon pote Pascal Hervé sur la Vuelta que je m'étais fait gauler. Mais elle a étouffé l'affaire. Pas pour ma gueule. Parce que Legeay renégociait à l'époque un contrat de trois ans avec Gan.».

Source : Libération 29/05/2001

Affaire étouffée aux Pays-Bas (2011)

A l'automne 2020, le site néerlandais wielerflits.nl publié une série d'articles affirmant que la fédération néerlandaise de cyclisme (KNWU) a étouffé une affaire de dopage à l'EPO en 2011.

Source : wielerflits.nl

Lire notre revue de presse ici

Contrôles annoncés à l'avance

Critérium de Calais 1997

"Vers cette même époque, j'ai participé à trois critériums sans enjeu, à Calais, Amiens et Aubervilliers. J'ai remarqué que certains de mes colistiers roulaient en proie à une anormale excitation, menaçant de chuter à chaque virage. J'ai mis cette conduite cahoteuse sur le compte de ces jeux interdits dont se délectait chacun, en mélangeant des substances improbables. En principe, ces courses ne font l'objet d'aucun contrôle. À Calais, l'organisateur a été cependant prévenu d'une inspection médicale. Il s'est empressé d'annoncer la nouvelle aux participants afin qu'ils réfrènent leur stupéfiante consommation." (Christophe Bassons - Positif)

Voir aussi le témoignage de Paul Kimmage.

Contrôles retardés

Lance Armstrong était un expert pour retarder les contrôles inopinés, se donnant ainsi le temps d'effectuer des manipulations sanguines et urinaires. En témoigne Michel Rieu, conseiller scientifique de l'Agence française de lutte contre le dopage : "Les préleveurs ont éprouvé des difficultés à effectuer des contrôles inopinés sans que Lance Armstrong puisse bénéficier d'un délai de vingt minutes. Il a été prévenu avant tous les contrôles. Je repense à un prélèvement inopiné alors qu'il s'entraînait dans le sud de la France lors de son retour sur le Tour en 2009. Son entourage avait accumulé prétextes et palabres pour obtenir ce fameux délai. En vingt minutes, beaucoup de manipulations sont possibles. Il effectuait des perfusions de sérum physiologique pour diluer son sang. Il remplaçait sa propre urine par une urine artificielle. Il s'administrait l'EPO par petites doses. La substance était indécelable. Sans les renseignements de la gendarmerie ou de la douane, il était impossible de combattre cette méthode. (...) On ne savait qu'à la dernière minute dans quel hôtel il s'était installé. D'où ces nombreux barrages. Ce fut un vrai parcours du combattant car il était prévenu sur ses lieux de résidence." (lemonde.fr, 25/08/2012)

Contrôles sanguins du matin

"En général, pour les tests sanguins, les directeurs sportifs sont prévenus à six heures moins dix. Les contrôles ont lieu à 6h30. Juste avant la prise de sang, on injecte des solutions à base d'eau et de sodium aux coureurs et cela fait baisser les taux. J'ai connu quelqu'un qui était au-dessus des taux autorisés et qui est passé au travers." (Pascal Lance - Sport et Vie - Mai-Juin 1998)

Contrôles annoncés trop tôt

Lors du Tour 2003 , l'AMA constate regrette que l'organisation prévienne "les coureurs contrôlés du jour vingt minutes avant l'arrivée de la course. Ce qui laisse le temps d'absorber un dopant à effet rapide. Idem pour le prologue ou le contre la montre individuel où l'avertissement est donné cinq minutes avant le départ du coureur." (Libération 25/09/2003)

Contrôles annoncés trop tôt (bis)

Bernard Roux, ex-entraineur de Laurent Roux, explique à propos de son contrôle positif lors de la Flèche Wallonne 1999 : "Bizarrement, ce jour-là, on vient lui annoncer qu'il sera contrôlé au bout d'une heure de course. Normalement, le tirage au sort des contrôlés a lieu dans la dernière heure... " (L'Humanité 04/07/2006)

Contrôles inopinés pas vraiment inopinés

En mars 2004, Philippe Gaumont (un expert !) déclare : "Ils ne sont pas inopinés, ils se font sur les lieux des stages et de course. On peut donc s'y préparer facilement pour être sûr de ne pas être positif". A propos du suivi longitudinal, il ajoute : "Les anomalies que révèle le suivi longitudinal sont largement sous-évaluées car, à chacune des quatre étapes, nous disposons de trois mois pour faire notre prise de sang. Comme pour les pseudo-contrôles inopinés, les coureurs ont donc largement le temps de s'y préparer." (Yahoo/AFP 15/03/2004)

Contrôles programmés

Laurent Fignon se souvient qu'à son époque, on ne risquait pas toujours d'être tiré au sort : "Il faut savoir, par exemple, que le dernier jour d'une course à étapes seuls les deux premiers de l'étape et les trois premiers du classement général étaient contrôles" (Nous étions jeunes et insouciants, 2009, page 116)

Vices de procédures

Jacques Anquetil en manque d'échantillons (1968)

"La cour d'appel de Bruxelles a acquitté Jacques Anquetil (...). Le champion normand avait été puni d'un an d'interdiction de courir en Belgique pour fait de doping qui se serait produit le 28 janvier 1968 à Anvers. Me Aline de Schrijver (...) n'a eu aucune peine pour démontrer la faute de procédure : aucun échantillon d'urine pour une éventuelle contre-performance (sic) n'avait été prélevée."

Source : L'Equipe 01-02/02/1969

Gert-Jan Theunisse, sauvé par le facteur (1990)

"En 1990, même cause et même effets, avec le cycliste néerlandais Gert-Jan Theunisse, contrôlé positif à la testostérone. Mieux encore, c'était la deuxième fois que le coureur hollandais se faisait pincer. Personne ne doutait alors qu'il allait écoper d'une sanction pour récidive. Encore eût-il fallut que le coureur ait reçu des instances concernées une notification de son premier contrôle positif. Ce qui n'avait pas été fait. Donc, pas de récidive, et pas de sanction."

Source : De la poudre aux yeux - Sylvie Voet - Michel Lafon 2004

L'affaire Djamolidine Abdoujaparov (1997)

"Lors du [tour de France 1997], le coureur Djamolidine Abdoujaparov, fut mis hors course après un contrôle positif, notamment au Bromantan. Rien à redire, sinon qu'on apprenait quelques jours plus tard que l'Ouzbek avait déjà été épinglé quatre fois pour le même produit durant les mois précédents et que, chaque fois, on s'était contenté d'un simple avertissement. Cette révélation a soulevé une belle polémique dans les milieux du vélo. En fait, celle-ci n'avait pas lieu d'être. Car si le Bromantan figure dans la liste olympique depuis le 31 janvier 1997, il n'a été officiellement intégré dans celle de l'UCI qu'à partir du 1er mai 1997. Avant cette date, les contrôles ne devaient donc logiquement donner lieu à aucune sanction aux trois jours de la Panne (le 2 avril), au grand prix de la ville de Rennes (le 6 avril) et à la Côte Picarde (le 22 avril). Le premier contrôle légalement positif de l'Ouzbek ne date que du 11 mai lors des quatre jours de Dunkerque. La transmission des résultats des laboratoires à l'UCI s'est effectuée dans les règles.

Fin mai, donc assez tardivement, cette dernière a informé la fédération d'Ouzbekistan qui, elle-aussi, a joué la montre en ne sanctionnant officiellement son coureur qu'à la fin du mois d'août. En somme, il n'y a pas eu de malversation dans l'affaire Abdoujaparov, seulement un peu de bureaucratie, ce qui s'explique tout de même assez mal à l'époque d'internet." (Arthur73 - Le cyclisme range ses "affaires")

Médecins-contrôleurs douteux

Le Docteur Kerrest

Avant de devenir Président de la Ceinture dorée cycliste léonarde, un club de Plouescat (Bretagne), le Docteur Kerrest fut médecin contrôleur lors des contrôles anti-dopage.

En novembre 2000, son nom apparaît en première ligne d'une affaire de dopage ! Il est accusé d'avoir prescrit des produits dopants à au moins cinq coureurs amateurs.

Médecins de mêche avec les coureurs

Jusqu'en 1985, les échantillons étaient envoyés aux laboratoires de contrôles par le médecin contrôleur lui-même. Certains de ces médecins étaient de mêche avec les coureurs comme le reconnaissait André Bonnin, le Président de la Commission Médicale de la FFC, lui-même, dans l'Equipe du 01/02/1985. Il venait d'entériner la décision de faire procéder aux envois par une tierse personne.

Médecins extrêmement courtois

Tour de France 1977 : "Le docteur Marsin est nantais, jeune et sympathique. Il en est à son premier Tour (...). C'est lui qui était chargé de la mission délicate des contrôles antidopage. " Tout s'est bien passé, dit-il, même si les coureurs m'ont fait des réflexions, voulant me convaincre que tout cela ne servait à rien. La première fois, selon la recommandation du commissaire de l'UCI, j'ai demandé aux coureurs de se dévêtir entièrement. Ensuite, après une intervention notamment de Merckx et Thévenet, les choses se sont passées un peu différemment, dans la plus extrême courtoisie." (L'Equipe, 15/07/1977)

Contrôleurs complaisants

Laurent Fignon se souvient avoir échappé à un contrôle positif alors qu'il avait pris de la cocaïne la veille de la dernière étape du Tour de Colombie 1984 : "Le lendemain matin au village-départ, sans avoir pourtant fermé l'œil, j'étais en plein forme. Tellement que j'ai gagné la dernière étape adjugée à Bogota. Puis, lorsqu'il a fallu que j'aille au contrôle antidopage, j'ai pris conscience de mon inconscience. En une fraction de seconde, j'ai vu toute ma carrière défiler. Je n'arrêtais pas de ma dire : "Mais pourquoi ai-je voulu gagner cette étape ? Pourquoi ?" Forcément, je croyais que j'allais être positif. Comment pouvait-il en être autrement. Puis, avant d'aller pisser, j'ai réfléchi deux minutes au contexte, à la course qui s'était déroulée depuis une semaine, à ce que j'y avais vu, à ce qu'on m'avait dit. Les colombiens avaient gagné pas mal d'étapes et tous, vraiment, tous, marchaient à la cocaïne : eurêka ! Les contrôleurs étaient forcément dans le coup. J'y suis allé un peu inquiet, mais rassuré par mon implacable raisonnement. Et comme prévu, je n'ai jamais eu de mauvaise surprise concernant ce contrôle." (Laurent Fignon, Nous étions jeunes et insouciants, 2009, page 170)

Mauvaise volonté

Trophée Baracchi 1968

"Je me souviens du Trophée Baracchi, que Jacques Anquetil avait gagné en 1968, associé à l'Italien Felice Gimondi. J'avais fait croire à Luciano Pezzi, le directeur sportif de Gimondi, alors que nous étions dans la même voiture, qu'Anquetil pouvait être positif au contrôle parce qu'il venait de soigner un rhume.
- Tu sais, ce serait dommage pour Felice et la Salvarani qu'il soit positif.
- Tu en es sûr ?
- Je suis sûr de rien, je te préviens, c'est tout.
Après la course, j'ai emmené Jacques au contrôle. II en est revenu tout heureux, il rigolait. Je lui ai dit " Je suis sûr que tu n'as pas eu de contrôle ?"
- Comment le sais-tu ?
J'avais bien compris qu'en me confiant à Pezzi, les choses s'arrangeraient avec les gens de la fédération..."
(Mes quatre vérités, Raphaël Geminiani, page 58)

Tour de France 2002

Michel Audran, spécialiste de la lutte antidopage, a analysé les urines de Lance Armstrong, prélevées pendant le Tour de France 2002. Ces urines lui on paru suspectes. Il déclare : "On n'a rien trouvé. J'étais stupéfait par la clarté des urines. On peut penser à un échange d'urine." Selon lui, Armstrong aurait pu échapper à la vigilance du médecin contrôleur et les autorités antidopage n'ont rien fait pour s'assurer que les urines étaient bien les siennes : "Il y a quelqu'un qui est présent lors de la collecte du flacon d'urine. Mais est-ce que la personne qui est à côté d'Armstrong osera mettre son nez dans ses affaires ! (...) Je sais qu'à l'époque j'avais demandé à ce qu'on fasse une identification des urines à partir de l'ADN et on ne l'a pas fait, je ne sais pas pour quelle raison." (L'affaire Jeanson, l'engrenage, Alain Gravel, Editions Voix parallèles, 2008, page 54)

Tour de France 1996

Au matin de la 12ème étape du Tour de France, alors que Bjarne Riis est maillot jaune depuis trois journées... il n'a toujours subi aucun contrôle antidopage. (Source : L'Equipe 12/07/1996)

L'UCI

Pendant le procès Festina, une lettre de la commission antidopage de l'UCI datée du 22/9/1993 alertant les directeurs sportifs a fait forte impression sur le tribunal. Celle-ci évoque "l'apparition dans les urines, lors de contrôles antidopage, de l'érytropoïétine, hormone peptidique produite par les reins et considérée comme substance dopante."

Preuve éclatante que dès 1993, l'UCI connaissait l'existance de l'EPO et, pire encore, savait la détecter dans les urines ! Ce n'est pourtant qu'en 2001 que les contrôles anti-EPO firent leur apparition officielle...

La ligue professionnelle

En France, est créée en 1993 la "formation disciplinaire de la ligue professionnelle" qui a le pouvoir d'aggraver les sanctions décidées par l'UCI et la FFC. Sa composition se veut équilibrée puisqu'elle est composée d'un journaliste (Pierre Chany), d'un juriste (Jean-François Lachaux), d'un organisateur de courses (Thierry Cazeneuve), d'un ancien commissaire international (Georges Bousquet) et d'un directeur sportif (Cyrille Guimard). Ce dernier, contrôlé positif trois fois, sanctionné deux fois, connait bien le sujet du dopage. Un gage de sérieux pour cette instance.

La Fédération d'Allemagne de l'Est

Dépêche de l'Equipe du 26/05/1967 :

"Une personnalité de la course - dont nous tairons le nom par courtoisie - nous a confié que le Hollandais Piet Tesselaar, les français Duchemin et Catiau, le Hongrois Takacz étaient bien suspects de dopage - on s'en doute - ce qui avait motivé leur mise hors course.
Toutefois, sur la prière des directeurs techniques intéressés, le communiqué laissait croire que les coureurs cités ont abandonné pour cause de maladie, version officielle donnée par les organisateurs qui veulent ainsi sauvegarder leurs liens d'amitié avec les pays des coureurs".

Laboratoire d'analyses de Rome

Sport et Vie, novembre-décembre 1998 : "L'enquête sur le dopage dans le football italien a démontré que le laboratoire d'analyses de Rome faisait vraiment n'importe quoi. On oubliait de sceller les enveloppes. On ajoutait du Coca Cola dans les éprouvettes pour tromper les machines. On changeait l'urine des sportifs par celle des médecins-contrôleurs. On perdait aussi certains flacons. (...) Finalement les seuls tests sérieux semblaient être ceux commandés en privé par les athlètes italiens de façon à déjouer les contrôles officiels. (...)"

Echantillons souillés

Témoignage de Roger Pingeon

"Il arrivait souvent, et pas seulement en 68, qu'on nous apprenne que ces prélèvements d'urine avaient " tourné." en raison de la chaleur, qu'ils étaient arrivés en mauvais état au laboratoire, qu'ils n'avaient pas pu être analysés. Très souvent cela pouvait avantager certains. Etait-ce la vérité ou avançait-on ça en guise d'excuses car des coureurs embarrassants étaient concernés ?" (Carnets de route, Tours et détours de Bertrand Duboux, page 133, cité par Jean-Pierre de Mondenard dans Tour de France - 33 vainqueurs face au dopage)

Tricheries lors des contrôles

Massimiliano Mori

Les exemples de tricheries au contrôles sont innombrables. L'annuaire du dopage en a répertorié 21, mais il ne s'agit que des coureurs qui ont été pris. Ceci laisse imaginer l'étendue de la fraude, surtout si les instances contrôleuses ont tendance à fermer les yeux.

Exemple récent, le cas de Massimiliano Mori lors de Tirreno-Adriatico 2003.

Substitution par un liquide organique négatif

Exemple plus ancien, Roger Bastide dans son livre Doping, les surhommes du vélo rapporte comment les coureurs remplaçaient l'urine par un liquide organique négatif au contrôle. C'était en 1967.

"André Desvages parti disputer quelques critériums en Belgique s'était d'abord étonné du nombre de coureurs qui portaient des pansements au poignet. Jusqu'à ce qu'il ait découvert l'astuce : une minuscule poire en caoutchouc, dissimulée sous le pansement, contenait le "liquide organique" négatif, recueilli avant le départ."

Substitution par les urines d'un tiers

Du grand Eddy Merckx : "Il était fréquent quand l'un d'entre nous ne pouvais pas uriner qu'un autre le fasse à sa place. De Vlaeminck et moi on s'est dépanné souvent." (Source L'Equipe 08/10/1993)

Roger Bastide, toujours dans son livre Doping, les surhommes du vélo décrit une autre astuce : "Gerben Karstens, arrivé 1er au Tour de Lombardie 1969 (...) ne s'expliquait pas comment son analyse s'était retrouvée positive car il s'était arrangé, assurait-on, pour faire uriner à sa place un de ses amis soigneur (...). Or le prélèvement de ce serviable compagnon se révéla positif : son épouse avoua (...) qu'il lui arrivait de prendre des produits dopants pour combattre la fatigue des heures de route qu'il accomplissait au volant de sa voiture ! Karstens a été déclassé."

Du grand Eddy Merckx : "Il était fréquent quand l'un d'entre nous ne pouvais pas uriner qu'un autre le fasse à sa place. De Vlaeminck et moi on s'est dépanné souvent." (Source L'Equipe 08/10/1993)

"Le Docteur de Mondenard a révélé (...) les éléments de son rapport, précisant que le constat de carence était plutôt un constat de fraude, puisque l'urine fournie par le vainqueur de Tours-Versailles n'était pas la sienne. Le Hollandais aurait tout simplement tenté de dissimuler dans son cuissard une poire en caoutchouc contenant une urine disons... anonyme. (...) Pourtant il se trouve quelqu'un pour l'approuver, son directeur sportif Maurice De Muer, qui déclare sans pudeur : "Je savais, dès dimanche que c'était " cuit ". Karstens n'a pas eu de chance, car de nombreux coureurs utilisent ce procédé sans se faire prendre ! Pour moi, il est toujours vainqueur !" (Source L'Equipe 05-06/10/1974)

Dilution du sang

Philippe Gaumont donne le mode d'emploi pour conserver un taux d'hématocrite inférieur à 50% : "La veille des courses, quand on pressentait qu'il y aurait un contrôle sanguin des médecins de l'UCI, Jean-Jacques passait dans les chambres et déposait sous chaque lit des poches contenant du sérum physiologique. Ainsi, après vérification avec une centrifugeuse, (...) ceux qui avaient un taux hématocrite trop élevé pouvaient se faire une perfusion et diluer leur sang."

Source : "Prisonnier du dopage" - Philippe Gaumont

Cette technique est également rapportée par Jesus Manzano : "Le matin, on te disait : "aujourd'hui, il y a contrôle des vampires". Avant d'aller voir les vampires, on avait trente minutes. Si tu étais à cinquante-deux points d'hématocrite, le masseur ou le docteur t'avait déjà tout préparé dans ta chambre. Il y avait toujours de quoi faire une injection dans les chambres d'hôtel. Il y en a pour dix minutes. Ils t'injectent 150ml de sérum d'albumine humaine et c'est immédiat. Tous les globules, en fait, font comme une éponge. Tout le liquide est retenu, le plasma se concentre et tout le sang normal reste. Après, tu dois boire de l'eau, beaucoup d'eau. C'est immédiat et ça t'enlève cinq points d'hématocrite."

Source : Emission Pièces à conviction, France 3, 22 septembre 2006.

Le plâtre providentiel

"Evidemment, tout le monde était au courant et il fallut se montrer chaque année plus discret. C'est alors que l'on faisait appel à l'ingéniosité des soigneurs. Un jour, un coureur prit le départ d'une étape avec l'avant-bras plâtré, ce qui força l'admiration de tous. La veuille, le directeur sportif avait pris soin d'annoncer à la presse que son équipier s'était blessé mais tenait courageusement à terminer la course. De courage, il n'en était pourtant nullement question. En posant le plâtre, le soigneur avait placé un tube métallique sur le bras du cycliste. Une fois le bandage sec, il suffisait de retirer le tube et de le remplacer par un préservatif plein d'urine non positive."

Source : De la poudre aux yeux - Sylvie Voet - Michel Lafon 2004

L'eau de Javel

Pour faire disparaître les amphétamines des urines, Christian Ossowski affirme avoir eu recours à cette méthode : "J'avais un truc imparable : je mouillais mon index avec un peu de Javel. Dans les urines, la Javel efface les traces d'amphétamines. Il suffisait que je me pisse sur le doigt et mon urine devenait illisible à l'analyse. J'ai fait ça et vu le faire des dizaines de fois. J'avais toujours une petite fiole de Javel sur moi."

Source : Paroles de dopés, Yves Bordenave et Serge Simon

La poussière de la mère Célestine

Pour faire disparaître l'EPO des urines, Jesus Manzano affirme avoir eu recours à cette méthode : "Après l'arrivée, si tu dois aller te présenter au contrôle, en fait, tu as un peu de temps, tu as un moment, 30 minutes de liberté. Alors, tu te laves un peu les jambes ou tu te fais masser. Et puis, quand arrive le contrôle, le masseur a déjà tout préparé pour toi. En fait, tout est dans un flacon de parfum où il cache des petits grains. Il te les donne, tu les prends, tu te les mets sur le pénis, dans l'urètre. Deux petits grains, trois petits grains... Tu ouvres le flacon, tu les mets, et c'est fait !". Les pastilles en question seraient connues dans le peloton sous le nom de "Poussière de la mère Célestine".

Source : Emission Pièces à conviction, France 3, 22 septembre 2006.

Cafouillages providentiels

Contrôles manqués lors des 4 jours de Dunkerque 1975

Dans les années 1970, les contrôles non effectués par la faute d'un médecin contrôleur absent ou en retard sont légion. Pour l'exemple

"Le contrôle médical est effectué chaque jour, mais hier soir, il a fallu que les coureurs trempés attendent une bonne demi-heure avant de repartir à leur hôtel, le médecin ne s'étant pas présenté !"

Pour la petite histoire, il en sera de même le lendemain...

Source : L'Equipe 09/05/1975 et 10/05/1975

Contrôles manqués lors du Critérium international de la route 1981

Encore un autre exemple...

"Il n'y a pas eu de contrôle antidopage au terme de l'étape en ligne de samedi, les deux premiers de l'étape (Hinault et Dominique Sanders) et le médecin de service ont attendu en vain le représentant fédéral..."

On imagine le soulagement de Dominique Sanders, contrôlé positif à la même période sur le Tour du Tarn.

Source : L'Equipe 30/03/1981

Contrôles manqués lors de Milan-San Remo 1996

Lors de Milan-San Remo, le contrôle est annulé pour cause de... vol ! L'Equipe écrit : "La fédération italienne a ouvert une enquête pour déterminer les circonstances qui ont conduit à l'annulation du contrôle antidopage prévu au terme de Milan-San Remo. Le matériel avait été en partie volé et les flacons ouverts rendant impossible tout contrôle."

Source : L'Equipe 28/03/1996

Contrôles manqués lors de Paris-Roubaix 2002

Lors de Paris-Roubaix 2002, les contrôleurs du Ministère de la Jeunesse et des Sports se trompent... de course et contrôlent une épreuve de VTT ! Il est vrai que Paris-Roubaix est une course si peu connue, si peu suivie, que même au Ministère tout le monde ne peut savoir à quoi ressemblent ses participants ! Ci-dessous le communiqué du Ministère :

"L'absence de contrôle antidopage à l'arrivée de Paris-Roubaix procède d'une erreur administrative imputable aux seuls services du ministère de la Jeunesse et des Sports". Après l'incroyable bévue de dimanche, le ministère assume ses responsabilités. "Les contrôleurs ont confondu l'épreuve de la Coupe du monde avec une épreuve de VTT, c'est une regrettable méprise", s'est-on excusé dans les colonnes de l'Equipe. Lundi, Amaury Sports Organisation avait envoyé une lettre au ministère pour faire part de son mécontentement.

Source : Sport24.com - 16/04/2002

Complicité des organisateurs

Semaine Catalane 1978

Les organisateurs sont souvent les premiers complices des coureurs. Ainsi, à propos de Freddy Maertens :

"La Semaine Catalane où l'organisateur se débrouille, à sa demande, pour aiguiller le "toubib" contrôleur sur une voie de garage : "pas de local pour le contrôle" annonce-t-on au médecin effaré."

Source Dictionnaire du dopage, Jean-Pierre de Mondenard, page 334

Mélange des genres

Affaire Philippe Gaumont

Un moyen intéressant d'échapper à une peine trop lourde est d'avoir dans la commission de discipline... son propre employeur !

"Dès le mois de juillet 1996, Cyrille Guimard m'a contacté. (...) Il me proposait un salaire de 70000 francs bruts, quatre fois moins que ce que j'aurais eu sans ce contrôle positif, mais presque trois fois plus que ce que je gagnais jusque-là.
Et, comme le monde du vélo ne recule devant aucun mélange des genres, Cyrille Guimard faisait partie du jury "indépendant" de la commission de discipline de la Fédération française de cyclisme qui a fixé ma suspension à six mois..."

Source : Prisonnier du dopage - Grasset 2005

Affaire Miguel Indurain

Si on ne peut avoir son propre employeur dans la "formation disciplinaire de la ligue professionnelle", on peut au moins compter sur la bienveillance de membres du "milieu" : pour le "juger" suite à son contrôle positif au Salbutamol sur le Tour de l'Oise 1994, Miguel Indurain pouvait compter sur Pierre Chany (journaliste de L'Equipe qui appartient à l'organisateur du Tour de France), Cyrille Guimard (directeur sportif et ancien dopé), Thierry Cazeneuve (organisateur du Dauphiné Libéré) et Jean-François Lachaume (juriste).

Indurain sera... blanchi. Ouf !

Source : L'Equipe 07/09/1994

Evolution opportune des règlements

Heureuse amnistie (1985)

En 1985, les sanctions pour contrôle positif sont assouplies : le coureur pris pour une première fois ne risque plus que 6 mois de suspension avec sursis au lieu d'un an précédemment. Bénédiction pour les coureurs qui purgeaient une peine : ils bénéficient d'une amnistie décidée par la FFC (L'Equipe 01/02/185 & 13/03/1985).

Nouvel assouplissement décrété par l'UCI pendant l'hiver 1986-1987. Conséquence, pendant le Tour d'Italie 1987, le porteur du maillot rose ne sera pas contrôlé quotidiennement mais seulement à l'issue des étapes contre-la-montre et le dernier jour. (L'Equipe 21/05/1987).

L'affaire Jeannie Longo (1987)

Lors de sa tentative de record des 3 kms de 1987, Jeannie Longo est contrôlée positive à l'éphédrine (1 microgramme par millilitre). Elle se verra d'abord infliger un mois de suspension avant que le CIO ne fasse évoluer les règlements en applicant un seuil maximum de 5 microgrammes par millilitre. Dès lors, Jeannie Longo ne sera pas condamnée. (Cliquez ici pour lire ses explications)

Courses sans contrôle

Début de saison 1978

Alors que le Critérium International de la route s'élance, depuis le début de l'année 1978, il n'y a eu que 2 contrôles (sur Paris-Nice). (L'Equipe - 03/04/1978)

Paris-Nice 1982

Lors de Paris-Nice 1982, des contrôles antidopage étaient bien entendu prévus. Prévus mais effectués comme le rapporte cette dépêche de L'Equipe du 16/03/1982 : "Il n'y a eu qu'un contrôle antidopage d'effectué depuis le départ (...). Par ailleurs, un médecin s'était déplacé à Montluçon, mais sans flacons. Et hier soir, l'inspecteur disposait de flacons mais il n'avait plus de médecin sous la main. Il ne s'était pas déplacé."

Courses majeures en 1984

Marcel Tinazzi, alors Président de l'UNCP et tout juste contrôlé positif lors de Bordeaux-Paris 1984, affirme, dans l'Equipe du 28/07/1984, qu'aucun contrôle n'a été effectué sur Paris-Nice, les 4 Jours de Dunkerque, Paris-Camembert, le Dauphiné Libéré, le Tour de l'Aude et le Midi-Libre de la même année. Selon Charly Mottet dans L'Equipe du 27/02/1986, le Paris-Nice 1985 ne fut pas plus contrôlé...

La dernière étape du Tour de France

Dans son livre "Rough ride", Paul Kimmage, rapporte que lors de la dernière étape du Tour de France, seuls le vainqueur et les porteurs de maillots distinctifs étaient contrôlés : il n'y avait pas de tirage au sort. De quoi revoir avec un autre oeil les coups d'éclats de certains coureurs quand le peloton arrivait sur les Champs-Elysées et qu'il s'agissait d'empocher des primes. Ces mêmes coureurs figuraient rarement en haut du classement final de l'étape.

26 juillet 1986, veille de la dernière étape : "Après le diner, nous tinrent une réunion dans l'une des chambres. Un ou deux gars préparaient des seringues (...) [d']amphétamines. (...) J'étais étonné. (...) Ils rièrent. Sûrs d'eux. Demain, c'est la dernière étape. Seuls le vainqueur et les porteurs de maillots seront contrôlés. Il n'y a pas de tirage au sort. C'est pour ça que personne ne se fait pincer sur les Champs-Elysées.

27 juillet 1986, dernière étape : "Je vis l'un des gars prendre son truc. C'était si simple. Il ouvrit le tube de métal. Il retira la protection en plastique qui protégeait l'aiguille et la prit dans ses dents. Il retroussa la manche droite de son maillot, enfonça l'aiguille dans son épaule et d'une pression sur le piston injecta les amphétamines. Il remit le plastique sur l'aiguille, la seringue dans le tube de métal et celui-ci dans sa poche. Joliment fait et terriblement simple."

Ceci se passait à la fin des années 80...

Les épreuves du "Grand Prix des Chaudières"

Toujours dans son livre "Rough ride", Paul Kimmage, rapporte que de nombreuses épreuves de seconde zone ne faisaient jamais l'objet de contrôle. Evidemment tout le monde le savait et il était quasiment impossible pour un coureur non chargé de l'emporter.

Grand Prix de Plumelec 1988 :
Le lendemain du Tour d'Armorique, nous restâmes en Bretagne pour le Grand Prix de Plumelec. Course d'un jour, Plumelec fait partie d'une des classiques françaises où il n'y a jamais de contrôle. Ces courses sont connues sous le nom de "Grand Prix des Chaudières". (...) Mauléon-Moulin, le Grand Prix de Plouay, le Grand Prix de Cannes, tous sont des "Grand Prix des Chaudières". Lors des réunions d'équipes la veille de ces classiques, le discours des directeurs sportifs est toujours le même. "Maintenant les gars, je ne peux pas garantir qu'il n'y aura pas de contrôle, mais c'est Plumelec. (...) Nous sommes tous des professionels et c'est à chacun de se conduire comme tel. S'il y a un contrôle surprise et que quelqu'un est pris, je ferai de mon mieux pour le protéger."
Source : Rough ride

Ceci se passait à la fin des années 80. Depuis, à notre connaissance, aucun coureur ne s'est fait prendre dans une de ces courses. N'y aurait-il toujours pas de contrôle ?

Les critériums

Encore et toujours dans son livre "Rough ride", Paul Kimmage, rapporte ce que tout le monde savait : les critériums d'après-Tour de France, qui tenaient plus du spectacle que de la course, ne recevaient jamais la visite des médecins contrôleurs. Résultat, il devenait presque plus difficile pour un coureur propre de bien figurer dans un critérium que dans une étape du tour !

Dans le même registre, on lira le témoignage de Johan Van Der Velde. Ceci se passait à la fin des années 80, mais la situation n'avait guère changé en 1997 (voir le témoignage de Christophe Bassons)... Depuis les critériums ont quasiment disparu... Ouf !

Les Six Jours

"(...) J'ai participé, début 1987, aux Six Jours de Brême. Je m'étais bien préparé. Mais c'était très insuffisant pour rivaliser avec les spécialistes. Inutile de préciser qu'il n'y avait pas de contrôle antidopage : les amphétamines auraient mérité le plus beau des trophées ! D'ailleurs, ça roulait trop vite pour moi." (Laurent Fignon, Nous étions jeunes et insouciants, 2009, page 238)

La Route du Berry

"La Route du Berry (...) était une course qu'on prenait vraiment à la légère. D'ailleurs, nous savions tous les ans qu'il n'y avait jamais de contrôle antidopage. Inutile de préciser que la plupart des gars suçaient des amphétamines : beaucoup abusaient. L'un d'entre eux, qu'on surnommait " Nenesse ", était tellement nerveux et inconscient de ses actes qu'il sautait les trottoirs sans freiner !" (Laurent Fignon, Nous étions jeunes et insouciants, 2009, page 116)

Lenteur des procédures

Roland Green (2004)

Quand il n'est pas possible de passer au travers des contrôles, on peut toujours compter sur la lenteur des procédures. C'est ainsi que le VTTiste canadien Roland Green s'est vu infliger une suspension du 5 juillet 2004 au 4 avril 2005. Magie de la providence, la Canadian Cycling Association a attendu le mois de mai 2005 pour prendre cette terrible sanction ! (Source cyclismag.com)

Contrôles sans surveillance

Christophe Lavainne (1988)

"J'ai déjà vu des contrôles où je faisais les flacons moi-même et où je mettais les cachets. Je trouve ces choses inadmissibles." (Source Le journal du Tour - Antenne 2 - 22/07/1988)

Grève des contrôles

Prologue du Tour de France 1977

"Huit directeur sportifs sur dix, consultés par le président du jury, Jean Court, se sont déclarés opposés à un contrôle antidopage à l'issue du prologue, certains ayant manifesté leur opposition avec véhémence. Les deux directeurs sportifs favorables aux contrôles étaient ceux des équipes Gitane et Mercier..." (Source L'Equipe 01/07/1977) Le contrôle aura lieu malgré tout. Un constat de carence sera établi à l'encontre de Sebastian Pozo.

Critérium de Callac 1982

Les coureurs, avec leur tête Bernard Hinault refusent de se soumettre au contrôle à l'issue de ce criterium d'après Tour. Un constat de carence sera établi mais tous échapperont aux sanctions. (Cliquez ici pour en savoir plus)

Et si, malgré tout vous êtes reconnu positif...

Les stupéfiantes excuses

Et bien, il vous reste à trouver une bonne excuse...


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